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« Identité », le pire et le meilleur

‘’L’identité’’,  s’est imposée en concept de référence face aux interrogations multiples du monde contemporain.
Sur tous les continents, sur tous les sujets, il est brandi en étendard, appuyé sur des démonstrations, aussi définitives que contradictoires.
Aucun champ n’est épargné, sociologique, économique. Mais c’est bien entendu dans le champ politique que la revendication identitaire prend toute son acuité. Résolument sélective et férocement exclusive, elle transforme un questionnement légitime et vital en domaine d’affrontements allant de l’idéologique au guerrier.
Le paradoxe est que ce concept, supposé répondre aux interrogations ontologiques d’un temps de grandes ruptures, n’est lui-même le sujet d’aucune interrogation. Automatiquement accepté, il s’entend unanimement comme le héraut de la continuité, de la préservation.

Le pire : le grand malentendu

L’histoire est sage, assise avec l’ennui des sages,
Et tient un livre atroce ouvert sur ses genoux,
Elle mouille son doigt pour décoller des pages
Qui ne parlent jamais de nous.

Jean Cocteau découvre, avec la fulgurance du poète, le grand malentendu qui vicie dans leur fondement la quasi-totalité des attachements identitaires.
La référence à l’Histoire fonde en effet toujours sinon exclusivement, la recherche, l’explicitation et la mise en exergue d’une identité référente. Trump prétend retrouver avec ‘’America First’’ une vocation originale des Etats-Unis d’établir par sa propre force la plus grande puissance mondiale ; Marine le Pen et ses équivalents nationalistes européens prônent le retour exclusif aux racines constitutives de leurs nations ; et à l’inverse, les mêmes réfutent l’existence d’une identité européenne par absence de réalité historique ; en Israël, au-delà des dimensions sécuritaires, économiques, les prochaines élections s’articulent autour de la confrontation identitaire entre un fondamentalisme à racines ethno/religio/ géographique, et un centro-sionisme laborieux dérivé de l’original. Comme l’avait annoncé André Malraux, ‘’le XXI siècle sera religieux ou ne sera pas’’, et la donnée religieuse s’invite effectivement d’autorité dans le politique. Les fondamentalistes islamistes ressuscitent un Califat de leur grandeur passée ; les Evangélistes américains s’inspirent d’une conception radicale de leur chrétienté pour développer inexorablement leur stratégie œcuménique.
L’identité est spontanément conçue comme le respect d’une lignée historique, le maintien ou le retour au présent des données initiales d’un temps passé, la préservation d’un acquis fondateur.
Cette vision entraîne donc, sous l’autorité de l’histoire, la priorité et souvent l’exclusivité au respect du ‘’même, de ‘’l’idem’’, la transposition du passé et la défense de l’acquis.
Ouvrant du même coup la voie au pire. L’exergue des racines chrétiennes conduit au refus du mariage pour tous, de l’interruption volontaire de grossesse. Le nationalisme historique conduit au rejet absolu d’une immigration jugée a priori menaçant l’intégrité nationale. La soumission inconditionnelle aux lois coraniques conduit les extrémistes islamistes à la condamnation violente de tout ce qui s’y oppose. La loi de Moïse continue pour les Hassidimes à prévaloir sur les lois de l’Etat d’Israël. L’invention de la race aryenne conduit un illuminé et le peuple qu’il fascine au pire absolu. L’histoire a ses vertus. Elle constitue une ‘’recherche du temps perdu’ ’enrichissant humainement, intellectuellement, sociologiquement, le temps présent. Elle devient danger lorsqu’elle prétend conférer à l’identité ainsi conçue, l’exclusivité de la conduite du temps présent.

Le meilleur : voie du présent et voix du futur

‘’L’histoire décolle des pages qui ne parlent jamais de nous’’.
Le privilège historique fige l’identité dans la transposition d’un acquit. En oubliant que le temps passé est un temps perdu. ‘’L’histoire est l’étude des faits morts’’, dit Valéry, ‘’c’est l’étude des êtres n’existant pas’’ rajoute Alain, prolongeant Saint-Augustin, ‘’le passé, ce n’est pas le passé mais la présence du passé’’. Le passé ne devient ‘’le temps retrouvé’’ que dans son inscription dans le sang et le souffle du présent.
L’identité n’est pas seulement mémoire. ‘’Tout change perpétuellement, la seule chose immuable est la loi de cette perpétuelle métamorphose’’ disait déjà Héraclite. L’identité est ‘’le même’’ et, en même temps, changement. Elle est l’unité de la conscience de soi, qui suppose mémoire et anticipation, c’est-à-dire la synthèse qu’elle opère à travers tous les changements. De la même manière qu’un individu n’est pas seulement le résultat de son ADN, une entité collective, qu’elle soit locale, régionale, nationale, supranationale, ou ethnique, religieuse, est l’expression vivante d’une combinaison de facteurs du présent. Les Etat-Unis ne peuvent plus s’identifier seulement à la résurgence d’un ‘’America first’’. L’identité américaine doit intégrer son temps passé au temps qui passe. Depuis l’irruption des GAFSA, à la mixité démographique croissante, à la complexité nouvelle de sa position géostratégique. La réduction de l’identité française à un enracinement nationaliste ignore sa vocation à l’universel, son élargissement à d’autres cultures. L’Israël du XXIe siècle n’est plus que la combinaison bancale du Judaïsme et du Sionisme, mais l’a enrichi d’une dynamique économique, technologique, culturelle. Les formes radicales du christianisme, de l’islamisme, comme du nationalisme, apparaissent des défigurations de leurs notions d’origine.

L’identité n’est pas seulement mémoire. ‘’Tout change perpétuellement, la seule chose immuable est la loi de cette perpétuelle métamorphose’’ disait déjà Héraclite. L’identité est ‘’le même’’ et, en même temps, changement. Elle est l’unité de la conscience de soi, qui suppose mémoire et anticipation, c’est-à-dire la synthèse qu’elle opère à travers tous les changements. De la même manière qu’un individu n’est pas seulement le résultat de son ADN, une entité collective, qu’elle soit locale, régionale, nationale, supranationale, ou ethnique, religieuse, est l’expression vivante d’une combinaison de facteurs du présent.  Les Etat-Unis ne peuvent plus s’identifier seulement à la résurgence d’un ‘’America first’’. L’identité américaine doit intégrer son temps passé au temps qui passe. Depuis l’irruption des GAFSA, à la mixité démographique croissante, à la complexité nouvelle de sa position géostratégique. La réduction de l’identité française à un enracinement nationaliste ignore sa vocation à l’universel, son élargissement à d’autres cultures. L’Israël du XXIe siècle n’est plus que la combinaison bancale du Judaïsme et du Sionisme, mais l’a enrichi d’une dynamique économique, technologique, culturelle. Les formes radicales du christianisme, de l’islamisme, comme du nationalisme, apparaissent des défigurations  de leurs notions d’origine.

L’identité devient alors non constat, mais une force. Plus statique, mais dynamique. Ce redressement de perspective ouvre alors la voie au meilleur. La découverte de la force vive qui caractérise une collectivité, explicite ce qui différencie un pays de tous les autres, ce qui sous-tend ses activités, sa population.
Cette force vive porte une double exigence. La première tient à sa recherche et à son expression. Identifier l’identité d’un pays demande un examen large, objectif, de toutes ses composantes, passées, présentes, un effort rigoureux d’analyse et de synthèse, éliminant en particulier la dimension émotionnelle habituelle. La seconde tient à sa nature active. L’identité est un devoir. Elle est un objectif, en permanence activé. Elle demande une lucidité, un engagement constant, conscient, de tous, partout. Elle devient alors le moteur des actions au présent et la ligne de projection dans le futur.

L’identité : une entrée créatrice du présent et du futur

A partir du moment où l’approche identitaire n’est plus un enfermement mais au contraire une réinvention, s’ouvre alors une vision dynamique, positive, des questionnements habituels.
Une étude menée récemment, tente d’établir objectivement et rationnellement les bases sur lesquelles la France pourrait structurer sa reconquête identitaire. Cette reconquête s’appuie sur le concept d’identité réaffirmé d’humanisme.  La France du regret peut alors se transposer en France de l’avant-garde en revigorant et modernisant son acquit idéologique par son inventivité scientifique et culturelle, son aptitude à la rupture. Les trois notions fondatrices de l’identité française, Liberté, Egalité, Fraternité, réactualisées, complètent le système d’identité. Ces bases ouvrent une nouvelle entrée dans la problématique française  L’action publique retrouve l’essentiel maintenant disparu, un sens, qui facilite sa cohérence, sa compréhension et son acceptation par les citoyens. Quelques exemples. En économie, un programme de substitution progressive mais déterminée de l’industrie de l’armement par l’industrie et le service de l’écologie, appuyée sur les deux champions mondiaux français du secteur (Engie et Veolia). Dans le domaine social, sur la base d’évaluation d’un comité d’experts indépendants, un répertoire des populations les plus nécessiteuses est établi, et une échelle de revenu décent est défini, assuré par la solidarité nationale. En politique, le principe de subsidiarité érigé en règle absolue permet l’instauration d’un équilibre accepté des droits et devoirs de tous. L’immigration, régulé par une approche rationalisée et débarrassée des a priori émotionnels et idéologiques débouche sur un système d’intégration culturelle, économique, éducative, linguistique, financière, sociale, contribuant à l’équilibre démographique et économique du pays.

De la même manière que l’humanisme retrouvé devient l’âme motrice d’une France éternelle et nouvelle, une récente étude identitaire redonne à l’Europe, avec le concept régénéré de Terre Mère, un souffle nouveau à sa vocation originale. Il ne s’agit plus pour chaque pays européen de réinventer à force une maison nouvelle mais de réintégrer la maison familiale commune. Il ne s’agit plus de demander ce que l’Europe peut apporter mais de se demander ce que chacun peut apporter à l’Europe. Dans un monde constitué de grands acteurs géopolitiques, l’Europe, Terre mère, prend elle aussi un sens pour le temps présent et le futur, nourricier et protecteur de chacun de ses pays-enfants.

Dans un temps contemporain qui courre si vite sous le fouet de l’innovation technologique triomphante, de la médiatisation assourdissante, du brouhaha incontrôlé de la parole libérée de la contrainte morale, les hommes oublient de s’interroger sur la véracité des histoires qu’ils se racontent. Et qui du coup ‘’ne parlent jamais de nous’’.
Faire arrêt. Comprendre que l’approche identitaire n’est pas résurgence historique réinventée, mais continuité d’invention de vie, donne aux générations actuelles et à venir le sens, le désir et la dynamique de l’action.