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Entrechoc

Choc 1.Recruter un ‘’post-doc’’….Jonathan, béotien patenté, interrogea son interlocuteur, directeur d’étude dans un laboratoire de recherche en biologie. Qui lui expliqua, très candidement, la situation. D’abord, décrocher le Graal, obtenir le budget de recrutement d’un poste temporaire. Le miracle.  Après appel à candidature, sélectionner les huit à dix dossiers les plus solides, auditer les heureux candidats, choisir l’élu(e). C’est-à-dire renvoyer à leurs déjà très, très longues études, les recalés.-Très longues études, ça signifie ?La réponse lui fit penser à l’adage, ‘’à question idiote, réponse idiote’’. Bac + 11. Tout simplement. D’où viennent donc ces ‘’post-doc ?’’ Issus  des universités niveau master et doctorat ou bien de grandes Ecoles. Le doctorat ? Minimum trois ans, rédaction d’une thèse sous la direction d’un directeur de thèse, soutenance de la thèse. Où tout ça mène-t-il ? Au mieux à un CDD. Et à quel salaire ? 1 800 euros par mois. Avec Bac + 11 ? Oui. Les recalés ? A la galère, aux petits boulots, à l’abandon, au départ à l’étranger.Un gâchis humain épouvantable. Une sous-valorisation catastrophique.

Choc 2.A peine remis de cette découverte précise, cataclysmique, Jonathan commit l’imprudence d’errer  dans les travées d’une ‘’grande surface’’, comme elles se dénomment, dans une autre type de recherche, alimentaire celle-là.Et un autre aspect de la réalité quotidienne s’imposa accidentellement à lui. Un couple de jeunes, tenant leurs deux enfants par la main, se hissait sur la pointe de leurs quatre pieds pour lire de près, ensemble, les étiquettes de prix de croquettes pour chien.– 4 euros, je suis sûre de les avoir vues à 3,70 euros ailleurs -Tu crois ? – Je ne crois pas, je suis sûre – Alors, viens, on les laisse.Est-ce que l’économie de 30 centimes permet aussi d’optimiser sensiblement un salaire de 1 800 euros se demanda Jonathan ?


Choc 3.Le présentateur du journal télévisé du soir lista en sommaire les différents sujets qu’il allait aborder. Puis s’empara du sujet majeur qui mobilisait aussi bien les têtes du gouvernement que les différentes forces politiques de la majorité comme de l’opposition, que les célébrités du monde de la sociologie, de la philosophie, que les instituts de sondage, que les instances religieuses des diverses confessions : l’apparition de cet ovni étrange que Jonathan mit un certain temps à identifier, le ‘’burkini’’.Loin de le lancer dans une rêverie ethno-érotique, ce fameux sujet majeur annoncé triomphalement, provoqua chez lui un mélange détonnant de stupeur, d’indignation et d’incrédulité profonde.Quel chemin a pu conduire une société entière à ce niveau d’indigence, comment une interrogation sociétale légitime peut-elle dériver dans une comédie  de combats ubuesques, de faux-culs et d’affrontement à coups de mentons mussoliniens ?Cet entrechoquement fit naître deux niveaux de réflexions Jonathanesques.Niveau 1La chaine de l’artificiel !La hantise de l’élection et/ou de la réélection mène les politiques par le bout de leur nez dans une recherche éperdue du gain de l’opinion par le plus grand facteur émotionnel possible. La hantise de l’audience pousse les médias à coller aux basques des politiques dans la chasse au plus grand dénominateur démagogique. Les réseaux sociaux relaient allègrement ce mouvement brownien, entretenant ainsi une représentation théâtralisée en apesanteur, ignorante de la réalité vivante.Niveau 2La société de l’artifice !La recherche du spectaculaire aboutit à caricaturer la dimension éthique, sociale et économique de l’intégration d’une minorité culturellement différente de la majorité. Là où l’orchestration devrait s’imposer, on bat le tambour. A mettre tous les feux de la rampe sur un sujet starifié, la société rejette dans l’ombre et occulte les vrais piliers de son devenir. Le traitement honteux, en dépit de grandes déclarations, de la recherche, le déni de priorité à donner à la jeunesse en termes d’emploi, de formation, deviennent les marqueurs…..Jonathan s’interrompit pour décrocher le téléphone qui sonnait, et pour entendre son ami chercheur lui crier-J’ai quand même oublié de te dire : en dépit de tout, les jeunes chercheurs sont en train de changer le monde.

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